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Bien que la logistique urbaine existe depuis qu’il y a des Hommes et de villes, elle bénéficie ces derniers temps d’un éclairage particulièrement important du fait du rôle croissant de la ville en tant qu’espace économique majeur, regroupant non seulement les fonctions commerciales traditionnelles, mais aussi la majorité des services de nos sociétés ; dont le E-commerce.
Avec la recherche de productivité à l’échelle mondiale, les systèmes de production évoluent et les ensembles industriels se fragmentent, nécessitant une spécialisation et une mécanisation qui dépendent d’échanges matériels et immatériels efficaces, favorisés par des environnements urbains denses.
Dans ce contexte, la logistique joue un rôle central dans les choix organisationnels des producteurs, des consommateurs et des responsables des villes, étant une fonction indispensable pour toute activité économique et sociale. Les échanges de marchandises se multiplient et s’accélèrent, ce qui crée des défis nouveaux tandis que les villes cherchent à renforcer leur attractivité en modifiant leur cadre ambiant et en limitant les nuisances.
La question de l’intégration de la circulation des marchandises en milieu urbain devient essentielle, avec la recomposition des chaînes logistiques et la recherche de solutions basées sur la massification des flux pour limiter le nombre de véhicules en circulation. Remplir les véhicules au maximum de leur capacité d’emport devient une nécessité pour contenir les coûts de desserte de la ville et minimiser les atteintes à l’environnement.
Cela entraîne la création de points de rupture de charge, proches du centre de la zone à distribuer, mais ces lieux d’accueil sont rares et coûteux et à rebours de ce qui s’est fait ces dernières décades. La logistique entre en friction avec d’autres fonctions urbaines telles que l’habitat, les commerces et les services. La puissance publique doit donc intervenir pour réintroduire les métiers de la circulation des marchandises en créant des espaces dédiés dans le tissu urbain.
Un resserrement d’actualité
Depuis les années 1980, les chaînes logistiques créées par les industriels et les distributeurs ont conduit à la mise en place de grandes plateformes logistiques en périphérie des agglomérations. Cependant, le dernier segment de la chaîne reliant ces plateformes aux clients urbains a été pris en compte tardivement. Les acteurs institutionnels et professionnels se sont mobilisés dans les années 2000 pour améliorer ce maillon, qui représente un quart à un tiers des coûts logistiques. Les espaces logistiques urbains (ELU), également appelés plateformes logistiques urbaines, sont au cœur de ces préoccupations, en tant qu’interfaces entre l’interurbain et l’urbain, le privé et le public, le producteur et le consommateur.
Les enjeux pour la sphère publique, qui regroupe les institutions et les usagers, se situent dans les domaines environnementaux, économiques et fonctionnels. Il s’agit notamment de rationaliser la desserte urbaine, de maintenir les activités commerciales et artisanales en ville, de réglementer les livraisons, de répondre aux besoins en surfaces pour la logistique urbaine et de réfléchir aux infrastructures de circulation dans une perspective multimodale. Les enjeux environnementaux sont liés aux déplacements des marchandises et à leurs conséquences sur la qualité de vie et l’image de la ville. Les enjeux économiques concernent les coûts de mise à disposition des produits en ville et l’attractivité des centres-villes. Les enjeux fonctionnels portent sur l’adaptation de la ville aux besoins de circulation des marchandises afin de garantir son bon fonctionnement.
Les enjeux pour la sphère privée, composée des professionnels, sont influencés par des considérations financières. Les chargeurs et les prestataires logistiques prennent en compte les coûts et les contraintes financières dans leurs choix. Les chargeurs cherchent à optimiser leurs coûts de transport, tandis que les prestataires logistiques doivent fournir des services efficaces et rentables. Les contraintes financières sont donc un élément clé dans les décisions prises par les acteurs privés.
Pas simple d’orchestrer ces différentes sensibilités et de concilier tous les objectifs divergents.
Pour des flux en mutation…
Le système complexe composé des sphères urbaine et économique présente des modes de fonctionnement distincts mais complémentaires. Cependant, des passerelles sont en train de se développer pour organiser des réponses satisfaisant à la fois les besoins économiques et les besoins d’aménagement urbain.
L’accessibilité aux pôles urbains est de plus en plus contrainte en raison de réglementations de plus en plus strictes et des congestions chroniques du réseau routier. Les schémas logistiques classiques permettent la massification des flux vers des plateformes ou entrepôts basés sur une localisation centrale, une capacité logistique et une optimisation des trajets. Les points de livraison fixes sont nombreux et dispersés. La logistique urbaine intègre des notions de proximité et de multiplicité, avec une dimension de plus en plus collective pour répondre à l’accroissement des volumes de livraisons en ville.
La coordination et la synchronisation des flux sont au centre des préoccupations dans les deux sphères. Les acteurs publics, tels que les gestionnaires de la ville, sont impliqués dans l’amélioration de la circulation des flux urbains, mais ils ne peuvent pas résoudre seuls les problèmes complexes liés à la logistique urbaine. De même, laisser le marché agir seul ne permet pas de répondre de manière satisfaisante aux besoins contradictoires des différents acteurs. Seule la collectivité est en mesure d’arbitrer et d’orienter la structuration des activités logistiques urbaines dans l’intérêt général.
Les demandes des habitants des villes peuvent sembler contradictoires, car ils refusent généralement l’installation d’équipements logistiques susceptibles de dégrader leur environnement, mais ils exigent également la proximité des biens dont ils ont besoin ou des livraisons rapides et fiables. Les entreprises expriment également des attentes différentes selon qu’elles sont orientées vers les échanges inter-entreprises (B2B) ou les échanges avec les particuliers (B2C). Les contraintes et attentes logistiques diffèrent en fonction des filières.
Pour répondre à ces demandes différenciées, les chaînes logistiques sont reconfigurées en prenant en compte des facteurs tels que le volume des livraisons, la fréquence des livraisons et l’emplacement des magasins sur la tournée de livraison. L’objectif est de trouver le meilleur équilibre entre fréquences de livraison, impact environnemental et disponibilité des produits en magasin.
En ce qui concerne la demande future, il est important d’amplifier les initiatives isolées et de passer à une phase d’action coordonnée. Les facteurs d’évolution de la demande comprennent l’augmentation de la livraison à domicile en raison de l’augmentation du prix des carburants, des habitudes de consommation et de l’abandon progressif de la voiture, ainsi que le développement des échanges de particulier à particulier, ce qui crée de nouveaux besoins logistiques à différentes échelles.
Les solutions possibles
La circulation des marchandises en milieu urbain joue désormais un rôle essentiel dans l’organisation économique et sociale des villes. Les collectivités locales prennent de plus en plus conscience de cette réalité et s’engagent dans l’organisation des flux de marchandises dans les agglomérations. Les documents de planification urbaine intègrent désormais cette dimension en réfléchissant à la localisation et à la taille des plateformes logistiques.
Les responsables de la ville utilisent ces équipements pour atteindre des objectifs de qualité de vie et de développement équilibré, tandis que les professionnels de la logistique y trouvent les moyens nécessaires pour optimiser les coûts et la qualité de service tout au long de la chaîne logistique. Les Espaces Logistiques Urbains (ELU) peuvent être classés en deux catégories : les généralistes et les spécialistes. Les premiers accueillent les professionnels de la logistique urbaine, tandis que les seconds accueillent des véhicules ou des marchandises destinées à des zones ou des clients spécifiques.
Les plateformes logistiques urbaines ou services de logistique urbaine peuvent prendre différentes formes.
Les ELU généralistes traduisent un rapprochement concentré des flux.
Les zones logistiques urbaines (ZLU) sont des zones d’activités dédiées à la logistique urbaine, permettant de positionner les acteurs de la logistique près de leurs clients pour limiter les déplacements de véhicules. Les centres de distribution urbaine (CDU) gèrent les flux qui parcourent la ville en regroupant les marchandises avant leur livraison finale. Ils agissent comme un service public de distribution des marchandises. Les hôtels logistiques sont des bâtiments multi-fonctionnels rassemblant diverses activités, et leur acceptabilité reste un défi.
Les ELU spécialisés sont plus ciblés spatialement ou fonctionnellement.
Ils offrent des solutions spécifiques aux problèmes de desserte urbaine.
- Les points d’accueil des véhicules (PAV) visent à résoudre les problèmes de stationnement des utilitaires lors des livraisons. Des lieux sécurisés sont mis en place pour que les chauffeurs puissent déposer ou récupérer les marchandises à pied ou à l’aide de moyens de transport non encombrants.
- Les points d’accueil des marchandises (PAM) sont des points relais permettant de faciliter la desserte de zones difficiles d’accès. Ils remplacent le destinataire ou l’expéditeur pour éviter les difficultés liées aux derniers mètres de livraison.
- Les boîtes logistiques urbaines (BLU) – consignes – lockers – établissent le lien entre le transporteur et le client sans nécessiter la présence d’une personne sur le lieu de transfert. Elles permettent de maîtriser le temps de livraison grâce à des dispositifs fixes ou mobiles implantés dans des lieux faciles d’accès.
2 axes majeurs pour faire levier
Face aux externalités négatives des écosystèmes urbains menacés par la pollution et les nuisances (accidents impliquant des véhicules, exposition aux agents polluants ou particules fines), il est nécessaire de changer de paradigme en matière de desserte urbaine.
Le premier axe consiste à mutualiser les moyens, tant du point de vue cinétique que statique. Cela implique de partager les capacités d’emport en favorisant l’utilisation de modes de transport massifs tels que le transport ferroviaire et fluvial. De plus, sur le dernier kilomètre, il est important de mutualiser les moyens de transport routiers existants et de promouvoir l’usage mixte des transports collectifs en partageant les infrastructures et les moyens roulants des réseaux de tramway, métro et bus. Ces mesures permettraient d’optimiser le taux de remplissage des véhicules de livraison et de favoriser le recours aux modes de transport plus respectueux de l’environnement.
Le deuxième axe de changement propose l’utilisation de motorisations alternatives, telles que les carburants alternatifs, les véhicules hybrides et électriques, pour réduire les émissions polluantes. En combinant les efforts de mutualisation et l’adoption de technologies “vertes”, il serait possible de réduire considérablement les coûts environnementaux du transport de marchandises en milieu urbain.
La réussite de ces initiatives dépend de la coopération entre tous les acteurs, publics et privés, impliqués dans la logistique urbaine. Il est important de concilier l’aménagement urbain avec la logistique urbaine en termes de schéma de déplacement, de consommation d’espace et d’impact visuel. Les réseaux de distribution des flux de marchandises doivent être considérés comme aussi importants que les réseaux d’eau, d’énergie et de télécommunications. Les gestionnaires des villes sont confrontés à un défi considérable, mais il est inévitable de relever ce défi pour adapter la logistique aux besoins de la ville… et de notre empreinte carbone.