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26 août 2025Quand la logistique croise l’assurance : vers une approche intégrée de la gestion des risques ?
Et si repenser sa logistique, c’était aussi revoir sa stratégie assurantielle ?
C’est la conviction qui émerge d’un dialogue entre Ann, experte en assurance, et Pierre, consultant en logistique. Ensemble, ils décryptent les liens concrets – et parfois négligés – entre supply chain, externalisation et protection des biens.
L’assurance, une composante souvent négligée de la logistique
Quand on parle d’assurance logistique, on pense d’abord au transport. Pourtant, comme le rappelle Ann :
« L’assurance dommages aux biens couvre les bâtiments, les équipements, mais aussi les stocks, y compris matières premières, encours et produits finis. »
Et dans le cas d’un sinistre, le niveau d’indemnisation dépend directement de l’estimation correcte des capitaux assurés. D’où l’intérêt de croiser les données logistiques avec une stratégie de couverture bien calibrée.
« Dans l’assurance dommages aux biens, l’assureur peut prévoir des dispositions d’assurance particulières pour l’estimation des biens garantis, avec ou sans latitude dans les valeurs.
Il est donc important de bien lire le contrat afin de savoir quelle est la logique appliquée par l’assureur dans son contrat afin d’éviter une règle proportionnelle en cas de sinistre », précise-t-elle.
Ceci vaut pour les stocks, comme pour les matériels et bâtiments.
Externaliser sa logistique, c’est aussi alléger sa facture d’assurance
Les prestataires logistiques n’offrent pas seulement de la capacité de stockage ou des services à valeur ajoutée. Ils peuvent aussi, indirectement, réduire l’exposition assurantielle d’une entreprise.
« Quand les stocks sont externalisés, explique Ann, le client n’a plus à assurer le clos et couvert. C’est le logisticien qui en est responsable, qui gère aussi la compatibilité entre les produits stockés, les hauteurs de stockage, les distances… la règlementation ICPE/DREAL. Le client, lui, n’assure que sa marchandise et s’économise moult tracasseries administratives et de protection des biens. »
Une bascule économique loin d’être anodine. Non seulement l’entreprise peut réduire sa prime d’assurance, mais elle évite aussi certaines dépenses annexes du type :
- Installation de systèmes de détection incendie coûteux ou mise en adéquation de ses locaux avec de nouvelles exigences assurantielles
- Entretien des locaux
- Taxe foncière
- Et même… gestion RH, si l’externalisation concerne aussi la prestation logistique (conditionnement, expédition)
Lire entre les clauses : comprendre les garanties et les responsabilités
Ann évoque avec Pierre un autre point de vigilance : les clauses d’assurance dans les contrats logistiques.
« Il y a souvent une clause qui prévoit que le déposant assure sa marchandise, avec une renonciation à recours. Mais encore faut-il bien mesurer l’étendue de ce qui est couvert ou non. »
La renonciation à recours signifie que le propriétaire de la marchandise ne pourra pas se retourner contre le logisticien en cas de sinistre (incendie, dégâts des eaux, etc.), même si ses biens sont détruits. Cette renonciation est par ailleurs souvent élargie aux assureurs des deux parties. À une condition : que les risques en question soient bien assurables, et assurés.
Mais attention : certains événements, comme la détérioration par vermine ou la chute de la marchandise, ne relèvent pas de l’assurance dommages aux biens.
« Dans ce cas, on parle de responsabilité professionnelle. Si le prestataire ne garantit pas un local sain ou s’il a fait une faute dans sa prestation logistique, il engage sa responsabilité. Le déposant est alors légitime pour demander réparation. »
Les points clés à vérifier dans un contrat logistique
Pierre, expert logistique, peu rompu à la complexité de ces mécanismes d’assurance, pose la question : « Concrètement, qu’est-ce qu’on doit vérifier avant de signer un contrat d’externalisation ? »
Ann liste quelques incontournables :
- Demander une attestation d’assurance responsabilité civile du prestataire
- Vérifier les montants garantis en dommages matériels
- Clarifier les risques couverts par les renonciations à recours
- S’assurer que les responsabilités professionnelles ne sont pas exclues des garanties
« Comme tout contrat, il faut lire les clauses de responsabilité et d’assurance. Et ne pas hésiter à se faire accompagner. »
L’intermédiaire d’assurance peut agir comme un Risk manager pour des entreprises qui n’ont pas une taille suffisante pour internaliser cette fonction. Encore une fois, externaliser permet d’avoir accès à des conseils professionnels à jour avec le marché de l’assurance et se départir d’un certain nombre de sujets de gestion de l’entreprise.
Une vision croisée pour des choix mieux éclairés
Cet échange révèle une chose essentielle : les décisions logistiques – internaliser, externaliser, dimensionner, stocker – ne doivent pas être pensées en silo s’il fallait une fois de plus l’écrire. Elles impactent AUSSI directement la structure assurantielle d’une entreprise.
« Il y a une vraie complémentarité de vision, conclut Ann. On parle chacun de notre métier, mais on touche les mêmes sujets. »
Pierre confirme :
« Même si je mesure tout ce que j’ai encore à progresser sur le sujet, je vois mieux maintenant l’intérêt d’intégrer l’assurance dans les réflexions sur les flux de production, les entrepôts ou les modèles d’exploitation pour apporter un conseil 360° »
Par Ann GOEMAERE, SARL ASSUREXCEL & Pierre