
Optimisation de tournées : panorama complet pour la logistique moderne
3 juillet 2025« Des pères au dos pété dans les entrepôts scellés…» – Robse, “Stress & Palettes”
Le rappeur lyonnais Robse ouvre un angle cru : la manutention casse les corps.
En France, selon l’INRS, les troubles musculo-squelettiques (TMS) sont la première maladie professionnelle reconnue ; ils représentent plus de 80 % des maladies indemnisées, 11 millions de journées de travail perdues et 1 milliard d’euros de coûts en 2021.
Année | Part des maladies professionnelles attribuées aux TMS |
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2023 | ≈ 80 % des maladies professionnelles reconnues |
2024 | 87 % des maladies professionnelles |
Le secteur logistique concentre l’essentiel des cas : 1,8 million de salariés, dont 80 % manutentionnaires ou caristes, et un taux de sinistralité deux fois supérieur à la moyenne nationale. C’est le quotidien de ceux qui, comme dans le morceau de Robse, ont les « vertèbres [qui] s’en souviennent ».
Deux grandes familles d’assistance physique pour soulager la manutention
Sur le terrain, on distingue désormais deux dispositifs portés : l’ergosquelette et l’exosquelette.
Les deux promettent de réduire la charge musculaire, mais leur philosophie et leurs contraintes diffèrent.
L’ergosquelette : le soutien mécanique passif
Principe : armature textile, lames carbone ou composite munie de ressorts. Elle emmagasine puis restitue l’énergie du mouvement ou verrouille une posture pour soulager le dos, les épaules ou les jambes.
Exemples d’usage : stations semi-debout prolongées, montage bras à l’horizontale, travail en flexion légère.
- Points forts : poids plume (1,5–4 kg), aucune batterie, réglage rapide, coût accessible (< 2 000 €). L’opérateur peut marcher ou monter des marches sans contrainte majeure. L’opérateur peut également garder cet EPI lors de l’utilisation des chariots de manutention.
- Points de vigilance : assistance limitée aux charges modérées ; risque de gêner la marche rapide ou de reporter les efforts vers les hanches si le réglage est inadéquat
L’exosquelette : l’assistance active ou hybride
Principe : structure articulée intégrant capteurs, moteurs ou vérins, pilotée par microcontrôleur et alimentée par batterie. Certains modèles se contentent de modules à ressorts (version « passive »), d’autres amplifient la force ou accompagnent le geste (version « active »).
Exemples d’usage : levage répétitif de colis > 15 kg, pose de charges en hauteur, vissage bras au-dessus des épaules.
- Atouts : réduction mesurée de l’activité musculaire jusqu’à 40 % sur les lombaires ou les deltoïdes ; paramétrage fin pour plusieurs opérateurs différents.
- Limites : masse de 6 à 15 kg, autonomie de 4–8 h, formation obligatoire et maintenance préventive de rigueur. Le poids mort et la rigidité peuvent augmenter la fatigue globale ou provoquer des déséquilibres si la tâche n’est pas parfaitement adaptée. De plus, cet EPI n’est pas compatible avec la conduite de chariots de manutention, ce qui rend possiblement la polyvalence plus dure à mettre en œuvre sur le terrain.
Comment orienter sa réflexion ?
- Analyser la tâche
Postures statiques, charges légères ? L’ergosquelette suffit souvent. Levage dynamique, geste au-dessus des épaules ? L’exosquelette actif devient pertinent tout en veillant à bien intégrer le dispositif dans l’environnement de travail.
- Impliquer les opérateurs*
Des essais terrain de plusieurs semaines, avec mesures de fatigue et retours d’usage, permettent d’éviter le syndrome du « matériel rangé au vestiaire ».
- Intégrer la prévention globale
Ni ergo- ni exosquelette ne compense un manque de pauses, une palette mal positionnée ou un quai trop étroit. L’INRS rappelle que ces solutions complètent, mais ne remplacent pas, la conception ergonomique des postes et la réduction à la source des contraintes. L’organisation du travail reste le 1er point à travailler.
Bonnes pratiques d’intégration, quelques pistes à travailler avec l’aide d’un.e. ergonome
- Diagnostic TMS sur données d’accidents, observations vidéo et questionnaires douleur. Le recours à un ergonome professionnel est fortement recommandé.
- Prototype in-situ auprès d’un groupe pilote (5–10 personnes) pendant 2 à 4 semaines.
- Ajustements techniques : réglage des ressorts ou de la courbe d’assistance moteur, adaptation aux morphologies.
- Formation & accompagnement : 1 h de théorie, 2 h de mise en main, puis rappel trimestriel.
- Suivi à 3 mois puis 1 an (absentéisme, biomécanique, satisfaction).
- Intégration du dispositif retenu dans la liste des EPI obligatoires à porter sur le lieu de travail.
En substance
Ergosquelette = soutien postural passif, léger et accessible. Idéal pour réduire la fatigue sur postes statiques ou semi-dynamiques.
Exosquelette = assistance mécanique active. Equipement plus coûteux et exigeant, capable d’abaisser significativement la contrainte pour les tâches de levage intense ou de travail bras en l’air.
En intégrant l’un ou l’autre, on ne remplace pas la prévention primaire (conception de poste, rythme, formation, polyvalence) mais on peut transformer le « stress et palettes » en un travail plus soutenable et durable sans casser les dos de la prochaine génération de manutentionnaires.
Par Pierre
La photo de l’article montre un exosquelette ou un ergosquelette ?